Commerces

Drancy a son nouveau marché

Après trois années sous la halle provisoire, le marché des 4 Routes retraverse la place du 19 mars 1962 pour s’installer définitivement au pied de l’îlot nouvellement construit. Si, pour le chaland, ce déménagement se fait naturellement, c’est un investissement financier et le fruit d’années de travail pour la ville et les commerçants.

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C’est l’histoire d’un centenaire qui retrouve sa jeunesse. Ouvert le 1er octobre 1922, le long de l’avenue Jean Jaurès, puis déménagé en 1927, sous une halle qui sera reconstruite au début des années 90, le marché des 4 Routes avait besoin d’un nouvel écrin. Mais dès la naissance de ce projet, il y a une quinzaine d’années, une chose est apparue évidente : il ne s’agissait pas de simplement construire une troisième halle, mais bien de réaménager totalement ce quartier, en lui insufflant une nouvelle vitalité commerciale.

Ce sera donc en ce même lieu, mais au pied d’un immeuble d’habitations et en compagnie d’autres enseignes, que ce nouveau marché sera aménagé. Mais comment assurer la transition, sans briser la dynamique commerciale ? Il était donc essentiel d’assurer une continuité dans le même périmètre.

  • Achat des coques du marché, des commerces associés , le parking souterrain et aménagement du marché :9 881 000 euros
  • Subvention : 500 000 euros par la Métropole du GrandParis 

Commerçante à Drancy, présidente du syndicat de commerçants et vice-présidente de la fédération des marchés de France

Que représente un tel déménagement pour les commerçants ?

C’est un très gros investissement pour tous les commerçants, mais ils ont joué le jeu. Chacun a dépensé entre 25 000 et 80 000 euros. Lorsque nous avons déménagé sous la halle provisoire, la plupart des étalages dataient de 1992, année de la rénovation de l’ancien marché. N’ayez crainte, tout était encore en bon état et ce qui ne fonctionnait pas était changé. Nous repartons tous ici avec des crédits et des stands souvent plus grands qu’auparavant. Une prise de risque qui montre que nous croyons tous à ce marché. Nous voyons tous à long terme. Humainement, c’est aussi une très belle aventure qui va nous permettre de nous remettre en question. Cela nous évite de nous endormir. En plus, maintenant nous nous retrouvons au cœur d’un pôle commercial avec le Lidl.

Cela change-t-il beaucoup de choses ?

La concurrence peut faire peur, mais j’ai confiance car j’ai déjà vécu ce type d’expérience. Généralement, c’est profitable pour les deux parties qui peuvent être complémentaires. D’autant plus que Lidl est monté en gamme depuis quelques années. Les clients, notamment ceux nombreux qui ne sont pas Drancéens, trouveront ici tout ce qui leur faut dans un périmètre restreint.

Les habitudes y étant bien ancrées, le déménager dans un autre quartier, même provisoirement le temps des travaux, aurait été trop risqué et la clientèle n’aurait peut-être pas suivi. Et que serait devenue l’autre partie du marché, le long de l’avenue Henri Barbusse ? Durant trois années, le marché sera donc abrité sous une halle provisoire, de l’autre côté de la place du 19 mars 1962. Un tout petit exil qui a pris fin dimanche 30 novembre.

Jour d’inauguration

Après une première matinée de rodage deux jours auparavant, le nouveau marché a donc officiellement ouvert ses portes en grande pompe. Les premiers clients ont été accueillis sur un tapis rouge par une haie d’honneur et les acclamations des commerçants, tous très heureux de débuter cette nouvelle aventure.

Pour tous ceux qui ont connu l’ancienne halle, l’effet était surprenant : quelle ville peut aujourd’hui se vanter de posséder un marché aussi moderne et lumineux ? Même les commerçants étaient sous le charme de cette halle conviviale. Tout y a été réfléchi avec sérieux, en tenant compte des besoins des acteurs qui font vivre un marché et qui vont l’utiliser durant des décennies. Il a d’ailleurs fallu déployer une logistique phénoménale pour organiser l’emménagement des commerçants : un mois d’allers et venues avec des centaines de prestataires différents. Sans oublier le passage retardé de la commission de sécurité, ce qui a malheureusement décalé l’ouverture d’une journée.

Désormais, avec sa halle de 1 882 m² (2 154 m² y compris les locaux techniques), le marché de Drancy vient d’entrer dans une autre ère. Les allées y sont larges et tous les stands le nécessitant ont des angles biseautés afin de laisser plus de place aux clients. Les commerçants ont fait réaliser des étals et des vitrines sur mesure, ce qui accentue encore la modernité des lieux. Un véritable espace de convivialité est même présent à l’entrée, avec une dizaine de tables de bistrot pour faire une pause bienvenue durant ses courses, devant un café. Même s’il reste des petites choses à terminer, comme l’installation d’une partie du faux plafond et de quelques éclairages, les clients ont apprécié cette première visite.

Il y avait néanmoins beaucoup de monde pour ce premier dimanche d’ouverture, chacun cherchant avant tout à retrouver ses étals favoris, tout en visitant les lieux. Toute la matinée, le syndicat du marché a offert des cabas de légumes aux clients et servi du vin chaud, en partenariat avec la Confrérie des enfants de la pomme de terre.

Un projet mené en concertation

Drancy tient à son marché car il est l’un des points forts de la ville. Ce n’est pas un hasard si une bonne moitié des milliers de clients hebdomadaires viennent d’autres communes alentours. La qualité des denrées proposées y est pour beaucoup, mais le fait que la municipalité ait toujours refusé de déléguer sa gestion à un prestataire privé n’y est pas étranger. Et comme le rappelait Aude Lagarde, maire de Drancy, lors de son discours inaugural, la réalisation de cette halle est "aussi le fruit d’années de discussions, parfois très animées, avec les commerçants qui ont tous joué le jeu". C’est grâce à ce partenariat, qui implique toutes les parties prenantes au sein d’un même projet cohérent que ce marché, beau et singulier, a pu voir le jour.

Chacun a bien compris que ce nouveau départ est une évolution majeure de notre ville. Un marché citadin, au pied d’un nouvel immeuble et avec une grande esplanade piétonne, est un pari audacieux. Et le fait de l’inaugurer à côté d’un Lidl flambant neuf, d’une brasserie très attendue, d’un chocolatier savoureux et bientôt d’un fromager révèle les ambitions d’une ville de banlieue, loin d’avoir renoncé à son attractivité.